15/10/2010

LHD - Limbs of the Fawns (2006)
















Le moustachu allemand avait raison : nous sommes bel et bien entrés dans l'ère de l'anarchie, du chaos atomistique et de la dispersion des forces. John Wiese, pilier de la harsh-noise américaine et Phil Blankenship, directeur du label Troniks, viennent, avec ce "Limbs of the Fawn" produit par l'excellent label Misanthropic Agenda, d'en modeler le constat total, brut, manifeste. Incomparable : seules trois immersions dans ce bain d'énergie pure me suffirent pour comprendre que ce "Limbs of the Fawn" faisait partie des tous meilleurs albums de harsh-noise jamais produit ; qu'un tel déchaînement cataclysmique afférent au genre pouvait être, tout entier, sous-tendu par une vision artistique pleine, stimulante, jouissive. Véritable chef d'œuvre, ce "Limbs of the Fawn" est à rapprocher du fabuleux "Walks With Me" de Jason Crumer en terme de qualité ; rapprochement qui les fait tous deux trôner au dessus de tout ce qui a bien pu (ou peut bien) se faire chez les adeptes du sado-masochisme sonore, complaisance stérile en option dont on se passera bien, dorénavant...

L'unique piste de cet album s'impose alors comme une expérience unique, physique, harassante même, mais dont la fascination instillée croîtra à exacte proportion de l'effort, que dis-je ? de l'endurance qu'il vous faudra fournir pour vous y immerger, pour la pénétrer et faire corps avec elle.

Mur de son colmaté pendant 36 minutes, sans aucun répit ni silence salvateur, la densité de la masse sonore qui s'abat sur vous et vous fige sur place semble, à première vue, rester statique, immobile, indifférenciée tant le déluge sonique s'opère de façon vertigineuse, indistincte, tant ses congestions internes dilacèrent à un rythme insoutenable une trame sonore perpétuellement créée et recréée, chaotique. A première vue seulement. Car à mesure de l'écoute et de l'écoulement des secondes, à mesure que le regard, plongeant toujours plus avant dans ce bain de matière, initialement aveuglé, perçoit de plus en plus clairement, par étapes, comme de phosphènes après éblouissement ; ce qui semblait trouble et incompréhensible gagne alors en acuité ; chaque détails, chaque agrégats sonores forment alors des strates, chaque strates évoluent et forment des lignes de forces disparates, et là, s'ouvre un univers d'extrême prolifération et de matière dispersive, brute, concrète, dans laquelle on évolue avec un étrange délice, une ivresse de contemplatif observant ces évolutions instables, ces compénétrations et ces reliefs mouvants, immergés que nous sommes dans ce ciment aux distensions et aux particules en mouvement perpétuel. Extraordinaire et inoubliable : LHD, l'art brut et l'art brutal comme manifeste d'une beauté toute aussi rêche et insoumise.


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