26/06/2010

Dave Liebman - Miles Away (1994)



Moins volcanique et strictement "coltranien" que lors de sa période formatrice, mais d'une justesse et d'une spiritualité toujours aussi rare ; Liebman, après avoir déchaîné foudres et tempêtes, se pose et parle désormais d'une mélancolie pénétrante, tranquille, à fleur de notes : maître du saxophone soprano, les reprises se succèdent, lénifient d'harmonies touchant juste, modulant un langage neuf, souple et beau : écoutez donc "Pan Piper", ou "In A Silent Way", ne s'abîme t'on pas dans la même contemplation telle que Charles Lloyd, celui-là même qui initia ce dernier aux arcanes du saxophone, de la flûte, de la mystique indienne, nous avait convié ? Une belle bouffée d'air dans une discographie pour le moins pléthorique, "Miles Away" est fait pour tous ceux qu'une, une seule note suffit à apaiser.

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Inade - Colliding Dimensions : Four live seasons (1995-2002)



Bafouilles à venir sur cette belle donation d'Inade : à peu près 4h de live propres à faire imploser votre salon, 4h propices, également, à réfléchir sur les rapports abstractions/émotions qu'une telle musique semble de plus en plus questionner, à mesure que murissent l'expérience des zicos et l'esthétique générale.

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23/06/2010

Dødheimsgard - 666 International (1999)



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Clann Zú - Rua (2002)





















La musique de Clann Zú fait plaisir: de l'indie qui va chercher loin niveau influences et qui rock (ma haine du genre à part, avouez que c'est rare, voire une oxymore). Ils étaient un peu prédestinés à ça, vu qu'ils sont étirés entre l'Irlande et l'Australie. On trouvera donc un côté post-hardcore, un côté folk, un côté pop arty/baroque, tout mélangé, et qui part plutôt fort avec Words for Snow qui, de violons mélancoliques, explose en 11/4 avec des "GET ME THE FUCK OUT OF HERE" criés sans laisser le violon de côté (c'est un membre à plein temps) qui fait des descentes avec la guitare, avant une série de breaks bien sentis, et tout ça avec une certaine classe. Intense, et c'est pas fini, les titres qui suivent sont tout aussi solides (avec certains plus calmes). Fait plaisir, donc, disais-je.

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Effi Briest - Rhizomes (2010)


















Avec son nom de groupe et d'album, sans compter sa pochette, ce premier disque appelle au sexisme: car les six filles de Brooklyn qui forment Effi Briest sont diablement jolies. Mais le bloggeur consciencieux peut se rattraper et ramener l'attention sur l'oeuvre, en rappelant que Effi Briest est le nom d'un (personnage d'un) célébre roman de littérature allemand (que je n'ai bien entendu pas lu).
Puisque je fais des intros, autant dire en passant que l'album fournit un petit plaisir que le mélomane est souvent surpris et frustré de se voir refuser. Vous savez, il y a tout un tas de groupes qu'on considère comme des pierres angulaires de l'histoire de la musique, mais quand il s'agit de dire quel groupe exactement ils ont influencé... on se gratte la tête (essayez donc, pour, je sais pas, Bowie, Morrison, Zappa). Ici, le groupe dont on peut clairement faire descendre Effi Briest est clair: Siouxsie and the Banshees. Et les aspects cool de la bande de Sioux: les percussions sur tonneaux rouillés, les grands espaces donné par une musique qui part de la basse, les cavalcades et hurlements de freak, et l'aspect féminin et arty (Siouxsie comme Effi Briest sont moins extrêmes que je le laisse entendre, mais si vous voulez, y'a un groupe qui s'appelle Skeletal Family).
Effi Briest n'a sûrement pas de titres aussi incroyablement géniaux que Cascade ou Into the Light, il y a moins de transpiration, mais elles n'ont pas à rougir de leur héritage. A vrai dire, si j'avais du réduire ce texte à une ligne, je dirais que c'est le disque que j'aurais souhaité voir la jeune et post-punk Björk faire. Rhizomes est rempli de talent, de sens de la mélodie, le style est parfaitement trouvé... et ça donne des chansons vraiment géniales, trippantes et agréables. L'album évolue également de manière intéressante. Mon préféré actuellement pour 2010.

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Gil Scott-Heron - I'm new here (2010)



Premier disque en 16 ans pour un vieux monsieur, une vieille carcasse qui sort de prison (la coke les enfants)... mais, s'il semble usé sur cette pochette, on tombera d'accord qu'il présente ce profil charismatique de l'homme sur lequel rien n'a prise, sûr de son âme, vulnérable et humain mais sans crainte. La mystérieuse irrationnelle sagesse des vieillards. Pas que la pochette: son spoken word avec sa voix de crooner allumé sur fond de soul/blues/jazz, ici agrémenté d'électronique, crie la classe. Sur un format de courtes chansons homogènes librement piquées de plusieurs interludes, c'est proche du génial, et pour l'instant y'a pas eu beaucoup mieux en 2010 (mais j'en ai sous la savate).

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22/06/2010

Verdunkeln - Einblick In Den Qualenfall (2007)



Les enfants, voilà de l'excellente drug music, propre à relativiser Burzum et ses épigones faiblards, dont le seul mérite consiste à montrer les choix à ne pas faire : manque de relief, répétition sans fièvre ni climax, rachitisme du son. Et pourquoi donc ? C'est que Verdunkeln, groupe allemand chapeauté par l'excellent label Van records, à défaut de s'inspirer du "maître", affirme désormais sa gravitation sur un orbite qui lui est propre ; et j'ai beau fureter un peu partout, impossible de retrouver une orientation, une pertinence dans le rendu similaires ailleurs.
C'est bien simple : là où le premier essai peinait à décoller et à convaincre - la faute à une batterie en carton -, le second arrache littéralement le toit grâce, en partie, au son désormais viscéral de cette même batterie : puissante, caverneuse, catchy. Entretenue par chacune de ses frappes, une fièvre rituelle se dégage très vite d'un ensemble dont l'humilité minimaliste (tout cela tient à fort peu de choses) n'a d'égale que l'osmose entre chaque instrument.

Si je devais tenter un parallèle hautement foireux comme angle d'attaque, j'oserai présenter cette injonction, tirée des Oracles Chaldaïques tels que retranscrits dans le Commentaire de Proclus, pour mieux prendre leur contre-pieds :

"Toi, cherche le canal de l'âme, d'où et de quel rang elle vient ; quand tu auras servi le corps, c'est vers ce rang d'où tu as glissé, qu'à nouveau tu remonteras, ayant joint l'acte à la parole sacrée."

L'acte, c'est le rite religieux, et la parole sacrée, celle attenant à la religion : joindre l'acte à la parole sacrée, c'est donc assurer la remontée de l'âme du corps d'où elle a chue à la communion retrouvée avec l'Un, dont l'âme procède. Conception platement platonicienne en somme ; mais Verdunkeln, alliant le rituel musical à la parole crachée, semble obnubilé par le monde de l'en dessous, le chthonien. Le corps comme sanctuaire, le corps comme précipice, et le vertige en dérivant : telle semble être la focale travaillant cette musique ; où l'initiation, d'étapes en étapes, et, en elles-même, de réitérations insistantes en jaillissement de fulgurances impromptues, cherche à révéler la consomption d'un feu intérieur, fiévreuse rupture de l'espace/temps, brusque cécité visionnaire, pour éphémère et artificielle qu'elle soit. Car s'il s'agit bien de BM ambiant, l'écriture demeure pour sa large part enclose dans le riffing.
Ainsi, Verdunkeln procède très simpl(ist?)ement : des cordes granitiques, minérales, tantôt édifient des parois figées, réverbérées, tantôt s'indifférencient en lits d'anciens canaux, tantôt tournoient en boucles angoissantes, scorie et distorsion en sus occupant l'espace sonore. Contrastent, avec cette dimension rocailleuse, la sonorité aquatique des divers leads introduisant et traversant chaque pièce de part en part, s'épanouissant en de longs solii inspirés, véritable danse des ombres dont la récurrence des motifs semblent plus invoquer qu'évoquer. Le point d'orgue, Der Herrsher, est le point crucial où semble aboutir toute cette tension générale : le Voile de Maya entr'ouvert, la brève mais aliénante vision de l'Un originaire, douce et rare ivresse couronnant cette plongée en nous-mêmes... et la réception finale, toute en cordes et en chœurs chaleureux, évoque, quant à elle, une forme d'accomplissement.

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20/06/2010

Laura Veirs - The Triumphs and Travails of Orphan Mae (2001)



Petit monde très beau, doux et lumineux, que cet album qui vient vous prendre au coeur. C'est personnel, très singer-songwriter d'aileurs. Il y a quelque chose dans la voix de Veirs, dans ces teintes ni tout à fait bluesy, bluegrass, pop ou orientales. Du charme et du talent sans doute. Pour les amateur d'Ani di Franco, de tout ce qui est à la fois populaire et idiosyncratique, car oui, c'est possible, et tellement plus courant qu'on ne le croit.

David Thomas Broughton vs. 7 Hertz - s/t (2007)



David Thomas Broughton me fascine. Dandy anglais à la folk pleine de cicatrices, c'est peut-être sa voix qui d'abord le distingue: ampoulée, enflée, noyée. Puis c'est son obsession du son lui-même, avec un jeu de guitare qui s'appuie sur des loops, qui créent des couches qui sont ensuite distordues. En découlent des ballades sentimentales en forme de longs jams. Son intérêt pour la manipulation sonore et l'improvisation donne tout son sens à la collaboration "vs." avec le quintet de cordes 7 Hertz qui donne ici de l'étoffe à ses compositions. L'enregistrement est, sauf erreur, live et donné tel quel.
J'aime beaucoup les deux pièces de fin, et le feel et l'approche générale, mais je tiens ce disque à coeur avant tout pour les dix minutes de Weight of my Love, d'une émotionnalité rare et qui pour couper court, fait voler en éclat un individu. Voilà, ça c'est un titre qui me transcende. Et du coup, j'ai rien d'autre à dire. Ah si, il coûte 5 dollars sur amazon.

Mountain Man - Made the Harbor (2010)



Une des dimensions intéressantes de la folk telle qu'elle est pratiquée au vingt et unième siècle, c'est qu'elle est possédée par le mythe de la folk et qu'elle l'utilise. Il y a cette idée de simplicité, de cordialité, de confort, de sérénité, à s'asseoir là où l'on vit et avec ceux que l'on connaît, pour égréner quelques notes sur une guitare et humer un chant. La folk c'est la proximité, le chez-soi, les cycles basiques qui entourent l'homme et la femme. On pourrait penser que l'homme actuel, incapable, pervers et en manque, ne pourrait que s'emparer de cette idée pour la dénaturer, la transformer avec une pénible auto-conscience. Pas bizarrement, ce n'est pas le cas; et la folk contemporaine de se porter sur l'immédiat, le perceptuel, l'attache. Il y a encore des gens, la folk avance avec et n'y perd rien.
Outre cette considération, ce qui me ravit dans la petite formation Mountain Man, c'est son orientation chorale: troix voix et une guitare (que des filles du Vermont). Il y a des titres où leurs harmonies font davantage mouche (Animal, Mounthwings, Sewee Sewee), mais c'est avant tout un album court de feeling général, où on accepte l'hospitalité, se creuse un coin chalheureux dans un coussin. Car, pour boucler la boucle, Mountain Man est composé et enregistré comme depuis un salon, semble craqueler, est le plus doux et tranquille lorsqu'il évoque la nature rugueuse et le voyage, semble inséparable de son Vermont natal. Et je souhaiterais pouvoir le dire sans que ça paraisse naïf, ou alors que ça le paraisse davantage.

Inade - The Incarnation of Solar Architects (2010)



C'est drôle, mais il y a une idée que j'ai toujours trouvé fabuleuse, et que j'ai sans cesse (et assez inexplicablement) refoulée, concernant l'acte de création humain par le biais de l'art. Le musicien (et l'artiste en général), par le triomphe sans cesse renouvelé sur la crudité des sons et des couleurs gisant en lui comme des virtualités, s'identifierait, par correspondance, au processus divin de création. De quoi Dieu aurait-il fait le monde, en effet, sinon des réalités qu'il trouvait en lui-même, et comment se représenter l'apparition réelle du mal, d'une opposition absolue contre Dieu, si cette opposition n'a pas préalablement existé en Dieu-même à l'état de simple potentialité, comprimée sans cesse et vaincue par la volonté divine ?

Et si l'Homme, par l'acte de création artistique - acte indissociable de la création de nouvelles valeurs, témoignerait d'une configuration irréductiblement divine ? Le théoandrisme en art : profonde vérité, ou paire de claques qui se perdent ? Or, s'il s'agit bien d'un Dieu artiste, créant et détruisant, n'existant que dans et par une création sans cesse renouvelée, indifférente, quelle commune mesure partagerait il avec le Dieu chrétien, moral et punisseur, prononçant toute Loi comme antérieure à, et déterminant la possibilité même de toute transgression ?

Plus que jamais, c'est cette cogitation qui me tourmente lorsque j'en viens à écouter certaines musiques dont l'inspiration et l'hermétisme font osciller mon appréciation entre adhésion absolue et scepticisme aigüe ; "The Incarnation of Solar Architects", et Inade dans l'ensemble de sa démarche artistique, ne laisse pas de me faire pencher d'un bout à l'autre de la balance, me laissant dans l'irrésolution la plus insupportable. Superficialité, ou vision géniale dans une telle interpénétration de couches sonore, astrales et abyssales ? Morceau de savoir absolu coincé au cœur de ce magma tellurique et pluri-dimensionnel (plus mélodique et tonal que sur les derniers efforts, "Aion Teleos"), ou délire induit de l'auditeur dans un vaste foutoir ne voulant rien dire, oblitérant la minutie de pièces telles que "Canon Proportion", ou du souffle mystique irrésistible (et quelque peu surfait, les cloches, on connaît ?) du morceau "The Lefthanded Sign" ? Ou un peu des deux ? Et si Inade laissait jouer, malgré l'extrême travail sur les sonorités et leurs agencements, malgré la véritable intelligence évolutive d'un morceau aux milles mosaïques internes, le facteur de l'aléatoire, de la conjonction occasionnelle entre l'idée que se forme l'auditeur de la musique écoutée, et du cheminement de l'Idée esthétique par les artistes eux-mêmes ? A moins qu'il ne faille, tel le mystique, réduire à néant sa raison et son entendement, demeurer en une station toute simple de l'esprit, d'attendre l'harmonique et son onde, pour d'embrasser le Tout sans tentative de formulation ? En ce cas, pourquoi parler musique ? Le faire apparaitrait comme contre-nature, et l'acte même du langage - comme la simple expérience de ne pas être mort.

De fait, et malgré mes hésitations, je reconnais en Inade une singularité réelle, une démarche qui, si elle s'inspire de celle de Lustmord période The Place Where The Black Stars Hang, demeure à la fois bien plus foisonnante (TPWTBSH serait au D.A ce que les hollandais sont à la peinture) et vivante, organique ; non exempt, cependant, de certains systématismes un peu trop "faciles" (la dimension tribale et chamanique, par exemple, autant écouter Halo Manash et apprendre le mot "invocation" dans son plein accomplissement).

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EDIT : suite à un oubli misérable, le lien vers le site officiel a été diligemment rajouté. Merci au courageux "Anonyme" de me l'avoir si aimablement signalé.

19/06/2010

Coil - Musick To Play In The Dark 2 (2000)





















Second volet du diptyque, "Musick To Play In The Dark 2" souffre, à mes yeux, de la comparaison avec son prédécesseur (le 1, pas Astral Disaster, paru entre-temps) ; lequel présente une forme condensée si bien taillé et polie qu'il me paraît difficile sinon d'égaler, du moins de rivaliser avec. Et pourtant. Pourtant, "Musick To Play In The Dark 2", s'il mise moins sur la concision de l'accroche que l'étirement du propos, n'en demeure pas moins fascinant (et tout à fait satisfaisant) pour tout rêveurs invétérés, pour peu qu'ils ferment les yeux sur, parfois, quelques idées dont le développement peine à décoller (Something et ses bidouillages aériens un peu casse-couilles, Where Are You s'essoufflant à force de répéter un théma mélodique moyen sur 7 minutes)

Beaucoup plus atmosphérique et éthéré, ce Coil-ci surprends par une étonnante prolifération, au sein d'un même morceau, de prismes kaléidoscopiques aux lumières foisonnantes, d'horizons multipliant les reliefs, les vertiges et les perspectives : une sorte d'In C électronique saisi en plein trip liminal, où les sons, qui se suivent et se succèdent, brodent et cardent une toile fantôme qui, d'une seule salve, se fait et se défait sous nos yeux.

Ainsi, le fantasmagorique "Tiny Golden Books" et ses éclosions intempestives de bourgeons miroitant, son évolution en une long morceau de bravoure quasi Schultzien dans l'âme ; de là, "Ether" et ses heurts aux diffractions lunaires, rehaussé d'un piano virtuose soulevant les astres, et pavant notre voie de voûtes étoilées... quant à Batwings, concluant cette nouvelle escapade dans l'infra-monde, je préfère ne rien en dire, sinon qu'il s'agit là d'un grand, très grand morceau, où Balance donne à entendre une magnifique prestation vocale, toute en contrepoint.

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Coil - Musick To Play In The Dark (1999)



Messieurs,

Afin de compléter le live Coil précédemment posté et mis à disposition -et de signer mon retour au sein du meilleur blog du monde, eeeeh oui- voilà l'écoulement de leur masterpiece sur ce marché international de la drug music.

"Moon Musick", le libellé est clair : ici, Coil, c'est l'efflorescence du sommeil en apnée, l'angoisse irréelle des synthétiseurs s'écoulant au rythme de glitchs inventifs (Are You Shivering ?), mêlé de psalmodies féminines à la pureté inquiétante, rompu de douces crises d'angoisses provoquées par la voix pénétrante, détachée, abîmée, ce chant ineffable de John Balance... l'épure, ici, est portée à son absolu couronnement, en l'espèce d'une finition que même le temps, les écoutes répétées, laissent inaltérable. De tout son potentiel, Coil nous en présente ici une synthèse quasi-alchimique. Aussi la forme que prends cet effort me paraît être la plus équilibrée en terme de spatialisation et d'efficience dans ses développements, de nuances aussi, au regard du second volet, bien moins probant à mes yeux.

Des boucles de l'extraordinaire "Red Birds Will Fly Out of the East and Destroy Paris in a Night" aux cavalcades analogiques épiques et grandiloquentes, entrecoupées d'iridescences fugaces, de plongées vertigineuses et de destructions lazeroïdes ludiques, en passant par le bouleversant "The Dreamer is Still Asleep" aux notes de piano minimalistes suspendant le temps en autant de halos fragiles ; tout ici n'est que joyaux polymorphes, joyaux de rêves insondables et d'escapades nocturnes, joyaux suspendus où le regard erre et dévoile l'indicible, qui a tôt fait de se dérober, une fois la valse des harmoniques, des tourbillons de voix et de couleurs, brèves radiances, évanouis. La cornue vide et délétère, il n'appartient alors qu'à nous de l'éprouver à nouveau, de la porter à ébullition, encore et encore - et, toujours, d'y étancher nos soifs d'hallucinations jusqu'à tant que l'œil, hors de son orbite, tombe.

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06/06/2010

Skitliv - Skandinavisk Misantropi (2009)



C'est norvégien et il y a "Misantropi" dans le titre : pas difficile de deviner à quoi ça va ressembler, a priori...

Skitliv ("vie de merde"), c'est Sven Erik "Maniac" Kristiansen, le type qui a dessiné le logo de Mayhem et qui pousse les cris d'écorché sur leur premier album (entre autres). Il en a marre de ses ex-potes et il en invite d'autres pour faire le gnouf.
Skitliv, c'est très décevant sur certains points : par exemple, ce son trop creux, trop net, pour jouer un style lent et qui se voudrait lourd, répétitif, hommage à Burzum oblige (Maniac adooooore ce que fait Varg). Du coup, les morceaux composés "tout seul" tombent un peu à plat.
Skitliv, c'est énorme sur d'autres plans : les guests, notamment, qui ont tous leur mot à dire et qui donnent une vraie respiration à l'album, stylistiquement parlant. Et il y a du beau monde : Niklas "Kvarforth" Olsson, de Shining, qui compose une partie des morceaux et adopte un style dépouillé catchy comme pas possible ; David Tibet et Attila Csihar qui viennent titiller le trouillomètre en mâchant le micro. Tout ça s'intègre parfaitement au style de Maniac, le bonifie, lui donne du caractère comme l'eau d'un glen à son whisky. D'ailleurs, Skitliv sans picole, c'est comme un tonneau vide : ça n'a pas de sens !

En une phrase : "When we have each other / We have everything."
Pour les amateurs de : Burzum, Shining (Swe), Current 93, Cathedral, Tormentor.

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Haemoth - Kontamination (2005)



Un peu de black metal aujourd'hui, ce qui ne surprendra pas mes co-rédacteurs chéris.

Comment parler de Haemoth ? Projet solo de celui qui apparaît dans Spektr sous le nom de H.th, le groupe n'a - au contraire de son petit frère - rien d'avant-gardiste. Riffs simplistes, batterie "utilitaire", voix cassée se voulant l'air méchant, pas de son synthétique, pas de sample, hormis dans les "interludes". En fait, en termes de composition, on a affaire à un projet de true black metal tout ce qu'il y a de plus ordinaire, avec quelques relents punk bien placés de ci - de là.
Mais ce n'est pas dans l'innovation d'écriture que "Kontamination" trouve son intérêt. C'est dans le son. Pour la petite histoire, après une distribution presqu'anecdotique chez Debemur Morti Productions, l'album a été ré-édité par... Southern Lord. Et est d'ailleurs sold-out depuis un petit bout de temps.

Rhâ bordel. J'ai connu des gens qui prétendaient écouter du black pour le côté violent et "evil" ; mais qui ne tenaient pas 20 secondes avec un casque sur les oreilles quand on leur passait la deuxième piste de cette galette. Aigüs stridents, courbes tout en attaque, comme une fraise de dentiste qui viendrait vous labourer les sinus, une grosse perceuse à bois crissant sur une plaque de zinc. Le contraste est sidérant, entre l'inévitable naïveté du riffing et la puissance de désagrément qui émane de cette manière d'enregistrer, comme si les mecs avaient poussé tous les potentiomètres (sauf les basses) à fond les ballons avant de récupérer le son sur un micro Fisher Price "pas plus de 60 dB" et d'ajouter des samples d'un hachoir Moulinex tentant de faire son sort à une assiette en cristal. Ce n'est pas tellement "violent", non, mais c'est haineux, c'est aggressif, comme si les musiciens voulaient nous crever les yeux et nous labourer le crâne en faisant passer une corde de Mi grave en inox d'une oreille à l'autre. On sent des influences comme le Filosofem de Burzum ou les premiers Mayhem, mais passés au broyeur pour en ressortir ce seul aspect de violence sonique et l'amplifier jusqu'à l'insupportable. Bref, c'est un grand album de true black. Un de temps en temps, au milieu de la nullité consternante qui pave cette scène, ça fait du bien.

En une phrase : "Ca fait mal aux oreilles tes conneries."
Pour les amateurs de : Burzum, Darkthrone, Xasthur, Mayhem, Spektr.

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01/06/2010

Χριστόδουλος Χάλαρης - Δροσουλίτες (1975)



Contexte: sous la direction de Christodoulos Halaris, passionné et/ou expert en reconstruction de musique ancienne (greco-byzantine), les chanteuses Dimitra Galani et Chrysanthos célèbrent à tour de rôle l'héritage antique. L'une de sa voix sensuelle, l'autre plus rocailleuse (les compositions sont bien adaptées à chacune) sur une musique vigoureuse et spirituelle qui évoque, je ne sais pas, les Drosoulites? (http://en.wikipedia.org/wiki/Drosoulites). De quoi faire vibrer tout ce qu'il y a de cordes en vous.

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